Exposition, EXTÉRIEURS PARCOURS
du 26 mai au 17 septembre 2023
Étang La Croix Lamirault
Cette grande exposition d’été “ Extérieurs “ présentée en plein air a été pensée comme un parcours qui vous permettra de découvrir le travail artistique et plastique d’artistes sculpteurs. Dix artistes* plasticiens s’emparent des espaces pour créer des œuvres sur mesure et titiller notre curiosité. La part belle est donnée aux matières naturelles, recyclées ou détournées comme le bois, le textile, la céramique ou encore le métal.
*Marie Heughebaert, Thierry Teneul, Benoit Delomez, Les Tisseuses de liens, Anne Laval, Thomas Van Reghem, Domitille Martin, Nicolas Guillemot, Christiane Müller, Bernard Blaise
LES ARTISTES
MARIE HEUGHEBAERT « Tribord-Bâbord »
Installation flottante Céramique émaillée
Depuis plusieurs années, mon travail puise sa source dans l’univers urbain et en particulier celui des chantiers. La signalétique y a pris place à de nombreuses reprises : Cônes de signalisation, rubalise, chaînes d’avertissement rouges et blanches, panneaux routiers divers, tous traduits en céramique, ont déjà pris place dans mon vocabulaire de formes.
Avec le projet pour l’étang Lacroix Lamirault s’ouvre l’opportunité pour moi de m’intéresser au balisage en mer et dans les ports, avec ces objets flottants signalant un danger, marquant une route, guidant les marins.
Transposés dans un lieu qui n’est ni la mer, ni un port, et de surcroît interdit à la navigation, ces balises de taille réduite deviennent un qui proquo, un malentendu. Traduites en céramique, elles deviennent des objets précieux et de ce fait encore plus incongrus. Par leurs formes et leurs couleurs, elles présentent un aspect ludique.
Tels les pions d’un échiquier ou les plots d’un parcours de motricité sur l’eau, elles nous renvoient à l’univers du jeu, de l’enfance. L’œil du promeneur circule, flotte entre ces balises, s’inventant un parcours, rêvant un voyage. Par la présence de ces objets, l’espace se transforme. Le titre de l’œuvre « Tribord-bâbord » ne fait que renforcer cette idée de jeu.
Parfois proches de la réalité, ces bouées dévient aussi vers l’imaginaire, se parent d’autres formes, d’autres couleurs.
Disposées sur l’eau pour créer un chenal fictif, elles composent un dessin dans l’espace et en cela situent l’œuvre à la jonction de la sculpture et des arts graphiques.
BENOIT DELOMEZ « Espace 3.4.5. »
Le 3 : espace tridimensionnel, le lieu intérieur et extérieur.
Le 4 : cube symbole de la Terre, des saisons, la dimension matérielle de l’existence.
Le 5 : élément Eau, Terre, Bois, Métal, Feu. Quête d’équilibre et d’harmonie. L’eau et la pierre. La présence d’un cours d’eau a souvent été essentielle à l’implantation d’une organisation urbaine et L’Aigle n’échappe pas à la règle. La première appellation connue de la ville en témoigne, il s’agit du nom Bec Ham. Ce mot provient de l’association de deux mots d’origine scandinave « bec » signifiant ruisseau et « ham », habitation. La rivière de la Risle apparaît alors comme un élément dominant de la ville.
Le site: l’ancienne carrière est devenue un étang, alimenté par la Risle, un site de loisirs.
« Mon travail n’a de cesse de se nourrir du lieu, d’inviter le visiteur à l’explorer, de s’y confondre parfois ou bien encore de l’habiter un instant ». Il prend ici forme dans cette sculpture/installation où des éléments de la nature sont associés à des techniques telles que la photographie, le miroir et le métal ou bien encore le bois brûlé (le Shou Sugi Ban, technique ancestrale du Japon, à l’origine utilisé afin de protéger les habitations nippones lors de tempêtes ou de pluies torrentielles).
ESPACE 3.4.5. produit une nouvelle architecture sur le site, une proposition de l’artiste au visiteur à traverser l’espace, à dénouer le vrai du faux, à s’y croiser, tout en intégrant le paysage par les fenêtres ouvertes. Le grand cube protecteur aux arêtes brûlées, en bascule, signe graphique du mouvement, de l’énergie du lieu, est tourné vers ici et demain ; il contient la roche suspendue, telle une pierre précieuse dans son écrin, réminiscence de l’ancienne carrière aujourd’hui en eau. Son image doublée et distanciée comme un souvenir lointain se reflète dans la nappe aquatique du miroir, tandis que l’image photographique habille l’extérieur de l’écrin pour une mise en abîme du minéral.
Sur le chemin noirci de bois brûlé, la ligne vibrante de lumière conduit le visiteur jusqu’à l’eau et crée le lien entre rivière et étang. Sur la berge, un dernier rocher, prêt à rouler dans le lit de la Risle, une ponctuation finale pour une pose en contemplant le courant, la clairière et les bois. L’étang La Croix Lamirault se veut un lieu propice à la détente, au bien- être, à la convivialité.
Comme une réponse à ce nouveau lieu, ESPACE 3.4.5. le questionne par ses composantes plastiques, architectoniques, symboliques et interactives.
THIERRY TENEUL « VIS »
S’il avait une forme, le temps ne serait pas rectiligne. On peut observer que les expériences d’autrefois se rejouent régulièrement et ne cessent de questionner le présent. Alors que la nouveauté offre l’illusion d’une évolution, elle ne fait pourtant pas table rase du passé. Les métamorphoses qu’elle induit ne font pas forcément progresser de manière positive l’état de la planète. Ainsi, l’histoire nous apprend combien relativiser ce qui aujourd’hui nous dépasse... Le projet consiste à réaliser une sculpture monumentale en branchages assemblés. Formant une spire, la sculpture incarnerait la figure que je conçois du temps. Ni linéaire, ni cyclique, il avance en se retournant constamment sur lui-même à l’image d’une plante en croissance.
La sculpture se développe sur 9 m de long et a environ 3 m de diamètre. Elle est faite avec les branchages tortueux de 3 à 6 cm de diamètre et assemblée avec du fil recuit. L’œuvre aura sans problème une durée de vie de 6 mois, mais si elle est respectée elle pourrait rester quelques années.
Sur un autre plan, la sculpture forme une sorte de « ressort » géant. Elle a ainsi la forme d’une pièce métallique essentielle à de nombreux mécanismes. Objet quasi intemporel, utilisé du moyen-âge à aujourd’hui, il interroge notre rapport à l’industrie. Qui jusqu’au XXe siècle était pensée comme moteur du développement de l’humanité. Mais dont le système est remis en question car nous vivons désormais une ère post-industriel consciente de l’urgence écologique.
Finalement avec le temps, tout n’est que va et vient, alternance d’états, compression décompression où la figure du ressort matérialise bien les phénomènes que nous voulons maitriser mais qui en fait nous dominent…
TISSEUSES DE LIENS « Dentelles Nomades »
Unies par le même désir de nouer des liens et de faire rêver, avec en commun, une passion particulière pour les dentelles.
Nous mettons en place des projets d’installations conçues à partir de matériaux de récupération. Nous intervenons principalement sur des lieux de promenade ou de passage dans l’idée de toucher un large public.
Au départ le goût de l’échange, du partage nous donne envie de travailler ensemble en alliant nos compétences. Nous sortons des placards les napperons oubliés, les relions ensemble en jouant des transparences, des pleins et des vides, des ombres et de la lumière. Fils et napperons ainsi tissés s’installent en légèreté dans un écrin de verdure où s’associent à l’architecture, modifiant la perception de ces lieux. Ces structures aériennes réhabilitent et offrent un nouveau regard sur les napperons de nos ancêtres qui «redressés» suscitent des souvenirs et de l’émotion. Nul besoin d’éducation à l’art, les «Dentelles Nomades» touchent un large public : jeunes et moins jeunes, femmes et hommes. Elles appréhendent le monde de façon poétique et sociale et tendent à provoquer des échanges riches et bienveillants.
ANNE LAVAL « Nature Fantôme »
Installation extérieur- 2023 - Gaze d’acier inoxydable - Dimensions variables
Mon projet pour ce site est de travailler sur les différents aspects de notre rapport à la nature et le lien qui nous lie à elle. Ce qui m’a frappé c’est cet étang immense fabriqué par l’homme alors que c’était des anciennes carrières. La carrière est un endroit où l’homme puise ses ressources pour lui-même sans faire attention forcement à ce qu’il détruit. Le besoin de reconstruire petit à petit des éléments naturels dans l’espace urbain nous fait réfléchir sur notre position entant qu’être humain sur cette nature maltraitée. J’ai choisi comme matériaux principal la gaze d’acier inoxydable pour plusieurs raisons. Elle est elle-même fabriquée par l’homme avec des ressource naturelle pour son bon vouloir, elle est normalement là pour filtrer les liquides comme l’eau. Mais en plus de sa fonctionnalité elle est pérenne, elle défie le temps comme l’homme voudrait le faire. De plus elle est malléable, la gaze d’acier inoxydable peut devenir organique, eau et brume. Elle brille à la lumière, devient évanescente, se densifie à l’ombre présente tel un esprit. Elle me parait donc appropriée pour évoquer l’eau en lien avec l’étang et former autour des arbres une installation d’un nuage étrange. Une nappe modelée de sphères qui s’approche de la brume que l’on connait bien en Normandie et qui nous rappelle un monde fantomatique et en voie de disparition.
THOMAS VAN REGHEM
Diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, est né en 1992 en Seine-Saint-Denis. Il vit actuellement à Aube, en Normandie et il fait partie de la résidence Poush, située à Aubervillier, depuis 2020. Son intérêt pour l’histoire, la géopolitique et la littérature font de lui un artiste nomade en quête d’un nouveau code sémiotique venu d’ailleurs. Dans notre monde voué à une perpétuelle métamorphose, certains univers deviennent les épicentres d’un laboratoire de création ; ils s’adaptent, se décomposent pour être recomposés. Le chaos questionne la vie. L’artiste nous propose une œuvre qui atteint l’universel et qui cherche à lutter contre l’impuissance de l’esprit à corréler tout ce dont il est témoin. Marqué par les dualités construction/destruction, vision/aveuglement, et conscient de la perte, il se veut un passeur, un bâtisseur acharné. L’artiste travaille sur la perte, les limites. Ses créations sont propices à la réflexion sur les incessantes décompositions et recompositions et les mouvements de renaissance. Opposé à la simplicité, il choisit le risque, il se mue en faiseur de mémoire en des terres amnésiques. Il fouille les décombres par le choix de ses matériaux et s’implique avec ténacité dans son rôle de collecte fragmentaire de terre, de cendres, de carcasses, de verre, de débris, de restes, de cheveux, de trouvailles fugaces pour capter la vulnérabilité de la vie entre les limbes du visible.
DOMITILLE MARTIN « Enlacés »
Les réalisations de Domitille Martin invitent à plonger dans un univers hybride et mystérieux où les frontières entre l’art et la nature, la réalité et l’imaginaire, se brouillent et se dissolvent pour mieux faire surgir de nouveaux visages du sensible.
Fascinée par le thème de la métamorphose, sa recherche artistique puise dans les matières et les formes d’origine naturelle qu’elle explore et triture pour mieux les transfigurer. Sa pratique vise à révéler la beauté singulière et l’infinie variété de ces matières à travers des sculptures ou des installations insolites.
Pour l’exposition Extérieurs, Domitille Martin crée une sculpture spécialement conçue pour l’évènement. Cette œuvre est composée d’une variété de cordes enlacées les unes aux autres.
Elle nous transporte dans une nature imaginaire faite d’enchevêtrements de cordes qui nous embrassent, de tissages semblables à des abris. Son œuvre est réalisée à partir de matières textiles, suspendue entres les arbres. Elle puise son inspiration dans la forme des lianes, racines, tiges, mais aussi d’objets issus de l’artisanat comme la vannerie, le tissage, les filets... Son travail se décline de nombreuses manières : tissé, noué, tressé, assemblé...
NICOLAS GUILLEMOT « Chemin de Pensée »
À l’âge de 10 ans, j’ai accidentellement laissé brûler une casserole de sucre. Le caramel s’est cristallisé sous la forme de carbone noir et scintillant. J’ai créé Foyer avec du bois récolté suite à des élagages d’arbres. J’ai ensuite brulé les branches pour retrouver cette teinte si noire et brillante. Le cocon formé par les branches calcinées fait écho aux nids brûlés par les incendies provoqués par le réchauffement climatique. De prime abord, l’installation évoque le défaitisme que l’on peut ressentir face aux enjeux écologiques. L’intérieur du nid, conçu à partir de matériaux de récupération réfléchissants, nous offre une vision plus lumineuse. En regardant vers le bas, l’observateur verra vers le haut : ciel, air, nuages, feuilles d’arbres, vent, oiseaux, son propre reflet ; tout ce qui n’est pas encore brûlé, et que nous devons protéger. Plusieurs désirs sont à l’origine de la création de Foyer. D’une part, mon envie d’aborder frontalement une thématique écologique, d’autre part, le souhait de travailler avec des matériaux naturels, et de récupérations. En tant que créateur, je suis de plus en plus bousculé par les questions écologiques qui occupent une grande place dans les débats de notre époque.
Ces problématiques m’interrogent sur le rôle des artistes, mais aussi, plus concrètement, sur la pollution que génèrent leurs pratiques.
CHRISTIANE MULLER « Mémoire de fleurs »
Cet herbier en 3D surdimensionné est créé, à partir de bois récupéré dans mon jardin et lors des promenades en forêt. C’est du bois recyclé, des trouvailles assemblées, afin d’inventer des structures organiques, de nouvelles formes originales. C’est une sorte d’hommage anticipé à une nature en danger pour garder une trace de (encore) l’existant, pour montrer à grande échelle la beauté et faire appel à toute notre imagination et créativité pour comprendre et éventuellement réinventer une nature…?
BERNARD BLAISE
« J’ai développé cette possibilité de servir la forme, géométrique ou stylisée, en m’appuyant sur les difficultés de mise en œuvre et en exploitant les atouts dûs à la fabrication rigoureuse de ce matériau très graphique qu’est le «grillage à poules». »
Je ne travaille qu’à main nue, armée d’une paire de bonnes pinces coupantes !
Selon le besoin je soude mes petites pièces d’étude. Pour les assemblages, je sertis avec les agrafes spécifiques our les surépaisseurs avec effets moirés, les arêtes des panneaux sont nouées.
Les fabricants mettent sur le marché une gamme sophistiquée de produits : laies, mailles et sections de fil pour «toiles» souples vendues en rouleaux, ou panneaux rigides, qui servent ma créativité et l’amplification pour les pièces monumentales. Jusqu’à présent, je me suis limité à la maille carrée, au fil zingué ou nu (rouillé), et sur mes dernières réalisations j’ai introduit la couleur.
Les pièces réalisées allient le paradoxe de la présence et de la discrétion. C’est à la suite des débats à propos de l’érection de la pyramide du Louvre que j’ai réfléchis à une proposition qui ne générerait pas de polémique d’où la transparence de l’ectoplasme.